Hommage à Loulou, le dernier maréchal-ferrant de La Garde-Freinet
Août 2021 • par René ROUX
Louis Novo s’est éteint le 4 juillet 2021. Né à La Garde-Freinet en 1925, il avait 96 ans. Attaché à l’histoire et au patrimoine du village, il était un des fondateurs de l’association pour la recherche de l’Histoire du Freinet (actuel Conservatoire du patrimoine du Freinet).
Comme René Farge et Tintin Olivier, c’était une des mémoires du village, participant à toutes les activités traditionnelles : le foot, le bal, les boules et surtout la chasse.
Du côté de sa mère, les Oliviers étaient une des plus vieilles familles de La Garde. Sa grand-mère était la gérante du Cercle des travailleurs dans les années trente.
À 14 ans, il part chez son oncle Olivier à Pierrefeu pour apprendre le métier de maréchal ferrant. En 1945, il travaille à la mine de Saint-Daumas, à La Garde-Freinet.
En 1947, il crée sa propre forge dans la maison familiale des Oliviers, rue des Jardins ; il y avait alors 130 chevaux à La Garde, il ne manquait pas d’ouvrage !
En 1948, il épouse Nini Rosso du village. Ils auront 2 enfants, 2 fils : Gilbert, né en 1950, et Gérard, né en 1954. Avec la diminution du nombre de chevaux et mulets sur la commune, il fait de plus en plus de la ferronnerie. En 1978, le curé du village, père Espitalier, lui demande de restaurer la Croix des Maures qui domine le village de ses 7 mètres.
En fait, il faut la refaire entièrement, toujours en fer. C’est ce que feront Loulou Novo et Georges Bernard dans la salle de la coopérative des châtaignes.
L’entreprise Cardaillac monta la Croix en haut de la colline, J. Pellegrino fit le socle en maçonnerie. Loulou ferma sa forge en 1985 et pris sa retraite.
Pour moi, né pendant la dernière guerre, quand Loulou arrêta la forge et éteignit son feu, c’était comme la fin d’une civilisation : celle des chevaux de labour, du liège, des châtaignes, du moulin à huile et de l’entraide villageoise traditionnelle.
La forge, comme le moulin à huile, c’était pour les enfants là où il faisait chaud l’hiver, mais c’était là-aussi que l’on écoutait les contes, les histoires et les galéjades des vieux paysans et artisans du village, souvent en provençal.
La forge c’était aussi bien-sûr la magie du feu et du fer avec l’énorme soufflet et l’enclume sonore. C’était les gros chevaux de labour que ferrait Loulou.
Souvent, j’apportai chez lui un « magaou » (pioche-hache), une « reille » de charrue, une ferrure à réparer. Loulou rendait toujours service. Que dois-je lui dire ? demandai-je à mon oncle Bertin Perrin, pour les outils.
– Rien, il SAIT !
En ce temps-là, on faisait faire ses menuiseries chez Francis, et Loulou les ferrait ; toujours prêt à donner un conseil. Aujourd’hui, on achète les menuiseries toutes ferrées chez Lapeyre, mais comme dit le renard dans le Petit Prince de Saint-Exupéry :
« Les hommes n’ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n’existe point de marchands d’amis, les hommes n’ont plus d’amis. »
Loulou le maréchal-ferrant était un artisan, mais c’était d’abord un ami.
Que notre amitié l’accompagne…