Jacques de Cuers, seigneur de Cogolin, fondateur d’une lignée de grands marins

Décembre 2017 • par Gérard ROCCHIA, historien local

Chronique historiquePersonnage célèbre

Lorsque Giovanni Domenico Cassini (1625-1712) quitte son Italie natale pour être présenté par Colbert au roi Louis XIV, il n’imagine certainement pas que trois générations d’astronomes vont suivre et contribuer à ce que son nom traverse les siècles jusqu’à aujourd’hui et soit associé aux grandes découvertes de la science moderne. Il en est de même pour Jacques de Cuers, seigneur de Cogolin, qui est son contemporain (1620-1700). C’est sur les océans, au cœur des grandes batailles navales et de la science de la cartographie marine, que le nom de la famille va perdurer sur également trois générations, et dont les travaux de cartographie marine sont encore reconnus aujourd’hui.

Jacques de Cuers descend d’une famille de la noblesse provençale remontant au XVe siècle. C’est son père, Henri de Cuers, marié à Marguerite de Vitalis, fille du seigneur de Ramatuelle, qui donne le titre de coseigneur de Cogolin à sa famille lorsqu’il achète la moitié de cette seigneurie le 3 janvier 1626 (l’autre moitié appartient à l’ordre de Malte). Dès lors, il se fera appeler :  » Monsieur de Cogolin « , titre dont hériteront tous ses descendants.
C’est en 1636 qu’il fait ses premières armes dans la marine. Embarqué sur « La Fourbine » en compagnie de son père, Il participe au siège des iles de Lérins, occupées par les troupes espagnoles (ces dernières se vengent en attaquant Saint-Tropez le 15 juin 1637, subissant une cuisante défaite. Les Tropéziens fêtent tous les 15 juin cette victoire par la bravade dite : « des Espagnols ») ; puis entre entre comme cadet dans le régiment des Gardes de la compagnie d’Evenos, où il participe à de nombreuses campagnes. En 1642, on le retrouve au siège de Barcelone et, en 1643, pour la première fois, lui est donné le commandement d’un vaisseau. Cette même année, après avoir pris un bateau ennemi à l’abordage, il est promu capitaine de vaisseau. Sa vaillance au combat est vite reconnue par ses hommes et par sa hiérarchie. Lors de la campagne suivante, alors que son bateau est entièrement consumé par un incendie après un abordage, il s’accroche sur les débris du navire et dérive un long moment avant qu’une chaloupe n’arrive à son secours.
Son frère, première victime navale de la famille Le 14 juin 1646, au cours du siège. d’Orbetello en Toscane, il commande le vaisseau « La Baleine », mais les Français doivent lever le siège après avoir perdu beaucoup d’hommes et d’officiers dont son frère, le chevalier de Cuers de Cogolin, le premier de cette illustre famille à mourir au combat.
Durant la fronde menée contre le jeune roi Louis XIV, il assiège et prend Saint-Tropez, tenu par les frondeurs. Pour cet exploit, le Duc de Vendôme le nomme lieutenant du roi de la ville et de sa citadelle, lui donne une compagnie du régiment de Lyon et une de celui de Provence. Ces deux compagnies sont placées en garnison à Saint-Tropez. On le retrouve lors de la prise de Cadaquès, où il s’illustre une nouvelle fois en prenant un moulin stratégique servant de fort. Il fait prisonnier un enseigne de vaisseau et vingt-cinq soldats espagnols, puis s’empare par surprise d’un gros navire qui empêchait toute manœuvre de la flotte française. La ville finit par se rendre et le duc de Vendôme, en présence de toute l’armée, attribue la victoire à Monsieur de Cogolin. Il rentre à Saint-Tropez auréolé de cette victoire.

Le premier officier de marine décoré par le roi de l’ordre de Saint-Louis
Après une campagne de deux ans contre Tunis et Alger, il envoie au roi l’étendard des galères de Tunis, ainsi que les armes de Mahomet Lassi, l’amiral des Tunisiens. Ces exploit fait dire au duc de Vivonne : « Monsieur de Cogolin, un des plus braves et des plus alertes de nos jeunes capitaines, et l’un des meilleurs dessinateurs et ingénieurs qu’il y est dans les ports. »
La bataille de Solebay, engagée contre les Hollandais, va une nouvelle fois lui permettre de faire valoir toute son intelligence et son courage. Sa réputation monte jusqu’à la cour de Versailles où, présenté au roi, il reçoit cet hommage royal : « Je sais, Monsieur de Cogolin, que vous avez sauvé les flottes combinées de France et d’Angleterre : je vous prouverai que je suis fort content de vos services. »
Nommé commandant de la marine à Toulon en 1682, il est chargé de dresser des cartes, plans et vues de la Méditerranée, dont principalement les côtes de Corse et de Sicile. Ces travaux seront publiés sous le titre « Observations des ports de la mer Méditerranée par le sieur de Cogolin, capitaine d’un des navires du roi ».
Lors de la guerre de la ligue d’Augsbourg, Jacques de Cuers reprend du service au commandement du vaisseau : « Le Florissant », armé de 76 canons. Il est accompagné de son fils, jeune enseigne de vaisseau, qui perd une jambe au cours de la bataille au large du cap Béveziers. Le roi reçoit l’année suivante les deux hommes. Il fait du père un chef d’escadre et le premier officier de marine décoré de l’ordre de Saint-Louis. Quant au fils, après avoir été fait lieutenant de vaisseau en 1691, il est promu capitaine de frégate en 1692, puis capitaine de vaisseau en 1693 à tout juste 27 ans.

Jacques de Cuers meurt à Toulon le 14 novembre 1700, laissant derrière lui une belle lignée d’officiers de marine qui honoreront fièrement la maison des « Monsieur de Cogolin ». Sa dépouille repose aujourd’hui sous le pavement de l’église Saint-Sauveur de Cogolin.

Source :
– Interview « Jacques de Cuers Cogolin, chef d’escadre des armées navales  » de Bernard ROMAGNAN – Emissionsde radio de RCF Méditerranée ( Écouter )

Autres suggestions

070817-chron-hiso-docteur-pascal

Lorsque Zola débaptise La Garde-Freinet pour la rebaptiser "la Palud"

Août 2017 • par Gérard ROCCHIA, historien local

histoire-locale

Le 11 septembre 1862, Blandine Ollivier, fille aînée du grand musicien Frants Liszt, épouse de l'homme politique E. Ollivier meurt en son château à l'âge de 27 ans

Mai 2017 • par Gérard ROCCHIA, historien local

La posidonie en Provence - Ramatuelle - Saint-Tropez

Juillet 2005 • par Bernard ROMAGNAN, vice-président du Conservatoire