Témoignage de la bravade de Saint-Tropez au XVIIIe siècle
Décembre 2021 • par Bernard ROMAGNAN, vice-président du Conservatoire
Tous les habitants du golfe de Saint-Tropez connaissent bien les bravades qui honorent pendant plusieurs jours le saint patron de nos terroirs. Mais que sait-on du déroulement de ces manifestations dans les siècles passés ? Claude-François Achard, médecin et érudit marseillais nous donne un témoignage exceptionnel de la bravade de Saint-Tropez à la fin du XVIIIe siècle dans son ouvrage : Description historique, géographique et topographique des villes, bourgs, villages et hameaux de la Provence ancienne et moderne, etc, publié à Aix-en-Provence en 1788.
« Le conseil municipal de la ville de S. Tropez, crée annuellement un capitaine de ville avec quatre capitaines de quartier pour être à la tête de la milice bourgeoise sous les ordres du major commandant pour le Roi et des consuls : ce privilège fut accordé par lettres patentes du roi Charles IX en 1565 et en considération de ce que les habitans sont obligés de prendre les armes pour veiller à la défense de leur ville ils ont toujours joui de l’exemption de la milice garde-côte. Le capitaine de ville marche dans toutes les cérémonies publiques avec les consuls et il prend rang après le troisième. Pour ce qui est des fêtes, vulgairement connues sous le nom de roumeiragi, il n’y en a qu’une seule à S.-Tropés, le jour de la fête du patron le 17 mai. Elle se célèbre depuis un tems immémorial avec grand éclat, ce qui attire beaucoup d’étrangers. La veille de la fête après-midi, les prêtres de la paroisse vont en procession à l’église des capucins pour y chanter les premières vêpres. Une compagnie de mousquetaires composée en grande partie de gens de mer sous les armes en uniforme bleu de Roi et paremens rouges, sous les ordres du capitaine de ville, de quatre capitaines de quartier et d’un enseigne, portant un drapeau blanc aux armes de la ville qui représentent s. Tropez habillé à la romaine avec un bateau, sur lequel il y a un coq et un chien. Ils marchent à la tête de la procession, précédés de tambours et de fifres. Ces mousquetaires sont suivis d’une compagnie de dragons à cheval, composés d’artisans en habit uniforme vert, parements et revers rouges, ayant aussi des tambours et des trompettes portant le même uniforme. La procession est arrêtée à chaque moment par les décharges de la mousqueterie et par les coups de pistolets que ces milices bourgeoises tirent d’abord devant la paroisse, ensuite à chaque place, sur le port ou le buste du saint est salué par le canon de tous les bâtimens qui se trouvent armés et devant les maisons des principaux habitans. La procession retourne après les vêpres dans le même ordre, avec le même cortège et le même bruit. Cette cérémonie se répète le lendemain, jour de la fête, avant et après la grande messe qui est célébrée dans la même église des capucins et l’après-midi aussi aux secondes vêpres. Au retour de chaque procession, les marguilliers de la confrairie de s. Tropés donnent une collation à tous les mousquetaires et dragons sur la place et là, ils tirent une quantité étonnante de coups de mousquets et de pistolets. La collation finie, tous donnent une aumône en faveur de la chapelle du saint, chacun suivant sa dévotion. Cette milice se retire ensuite en accompagnant d’abord le capitaine de ville jusqu’à sa maison au son des instruments et au bruit de la mousqueterie qui ne discontinue jamais. »
Pour aller plus loin :
– « Description historique, géographique et topographique des villes, bourgs, villages et hameaux de la Provence ancienne et moderne, etc » https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5368538v/f18.item.zoom
– FOURNIER Laurent Sébastien et HAMEAU Philippe, Les fêtes à bravade en Provence et ailleurs, Edition C’est-à-dire, 2018.
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